Tri Yann

Ce conte fantastique emprunté à la BD de Bilal dénonce plus sérieusement le remembrement abusif des villages pour le profit. L'album fut mis en scène par un grand spectacle réunissant pas moins de 80 musiciens et danseurs.

Tri Yann

Tri YannMusik glaz
Tri YannDigoradur - Ouverture
Tri YannL'abordage de l'Avelenn
Tri YannLes matins de chagrin
Tri YannWith a bing-tow-row-row
Tri YannL'ouverture du chantier
Tri YannSonerezh koz
Tri YannQuiemboi
Tri YannGavotten nevez war
Tri Yannsujet mouilc'hi Tromilio
Tri YannUn soir à Tréhoët
Tri YannKlemnou ha meleudi
Tri YannCantic war sujet an anaon
Tri YannChant des anciens
Tri YannMusik gwenn
Tri YannLe plus dur métier
Tri YannLes préparatifs du déménagement
Tri YannKimiad eur paour kaez den oblijet da guitad e vro
Tri YannLes guerriers d'une nuit
Tri YannHistoire du bateau blanc changé en goéland
Tri YannKan bale ar re varo
Tri YannGwerz inimaginabl war disparti lestr a vaen
Tri YannLes lambeaux de l'enfance
Tri YannL'en dro vert

Tri Yann
L'abordage de l'Avelenn
Un pêcheur de l'Avelenn rapporte le récit de la collision avec le Mathilda, yacht de l'odieux promoteur du projet "Tréhoët Grand Large". Au café du port, on évoque la dureté de la vie.

Moi qui ne suis qu'un rimailleur
Pas très bon chanteur ni compositeur,
Voici mon récit d'un drame abominable
A faire pleurer vos semblables.
Voilà la vrai vérité :
L'Avelenn un pauvre langoustier,
A cinq heures du soir, le treize de Février,
L'Avelenn allait rentrer.
Il fut planté par un salaud
Poent eo tennan en dro
Maudit soit le treize de Février.
Maudit soit le Mathilda
Par qui tant de malheur arriva,
Par qui Jean Pineau eut le bras arraché,
Que trois fois la mer en a saigné.
Trois fois le vent s'est levé.
Et le vent trois fois est retombé.
L'Avelenn, brisé, enfin n'a pu rentrer
Qu'à la nuit presque tombée.
A Tréhoët au vieux bistrot,
Poent eo tennan en dro
Ils ont bu toute la nuitée.
Pitié dit le paysan,
Le Crédit me reprend tout mon argent,
Je suis endetté, endetté jusqu'au cou,
Du mois d'Août jusqu'au mois d'Août.
Plaignez-moi dit le pêcheur
Je suis tout bouffé par l'armateur.
Plaignez Yann Quéré qui ne rêve que d'évasion,
L'arsenal est sa prison.
Et le vieux Breiz-Atao
Dans ce pauvre troquet crado,
Il se soûle pour tout oublier…

Tri Yann
Les matins de chagrin
Court récit inspiré à un modeste barde local par le témoignage des hirondelles.

Des prairies inondées en étés desséchés,
De tempêtes en forêts arrachées,
Tréhoët a traversé des matins de chagrin
Dont l'hirondelle fut souvent témoin.
Moi je n'ai de son aile qu'une plume trempée
Dans l'océan d'un encrier.
Pour vous dire la colère il est de meilleurs mots
Que les miens ou le cri d'un oiseau.

Tri Yann
With a bing-tow-row-row
Dans leur colère, les marins de Tréhoët ont composé cette chanson sur l'horrible Maurice Pégrouillot et son projet.

And we rant and we roar with a Bing-tow-row-row
Derry down derry boys derry Oh !
And we hope and we howl with a bing-tow-row-row
Derry down down derry Oh derry Oh !

Il saborde nos bateaux par le devant par le dos
Il se soûle au wisky, au bordeaux,
Et il paye ses grouillots à grands coups de croquenots,
So the winds will blow…

Il veut faire des gratte-ciel sur la plage de Goënno
Pour y foutre les gonzesses des blaireaux
A se faire dorer les fesses et les tremper dans l'eau,
When the winds will go…

Tu verras Pégrouillot on brûlera ton rafiot,
On te foutra à l'eau d'un canot,
On taillera dans tes os des piques à bigorneaux,
When the winds will blow…

Tri Yann
Quiemboi
Un travailleur Antillais, venu chercher du travail pour nourrir sa famille chante sa crainte après avoir été blessé par le Vieux.

Si man vini du pays moin
Cé pour travail pou fanmille moin
Man kité toute moun' en case la
Travail ka mankie la ba-a
E pi cé gos diab yo a
Yo pé lévé n'impot ki ça
Mai man pacé poté si moin
Pièce " Quiemboi " cont fanmille moin
Man peuh diab la c'est en socier
I pa ka vouai i sa visé
Cé pa lan Mor man ka chéché
Cé travail moin té ka mandé
E si moin doué mor si loin
Femm' moin kéno ampile chagrin
E si man pan pu rivini
Ki moun kiké occupé di
Si je suis venu de mon lointain pays
C'est pour travailler ici
J'ai quitté toute ma maisonnée
Car le travail manque là-bas
Le pouvoir de ces engins
Leur fait lever n'importe quoi
Et je ne veux pas prendre le risque
De réveiller les "Esprits" contre ma famille
Le Vieux là-haut c'est un sorcier
Même sans y voir il sait viser
Ce n'est pas la mort que je suis venu chercher
C'est du travail que je demande
Et si je dois mourir loin de chez moi
Ma femme aura beaucoup de chagrin
Et si je ne peux revenir
Qui donc s'occupera d'elle ?

Tri Yann
Gavotten nevez war sujet mouilc'hi Tromilio
Gilles Servat/Tri Yann
Gavotte nouvelle sur les gendarmes de Tromiliau et leur enchantement en merles.


C'Hwitell'ta c'hwitell moualc'hig da ouidell a blij din
Da vusik a lak em soñj Nij archerien Tromilio
En ur bignat d'ar c'hastell "Beg-e-dog" a lare
Diwallit d'an hini kozh a oar kalz taoliou fizik
Un deiz ma oan o neizheta e-kichen an touriou
E oan bet gwelet gantañ ha troet kerkent e moualc'h
N'eo ket peurechu e gomz ma bun flammou iskis
En dro d'ar begeliadou evel erevent bourjin
Askellou tan a glinkas beñsou an archerien
"Skornet ma reor !" e youc'hent en ur vont goustad er vann
Siffle, siffle petit merle, ta chansonnette me plaît,
Ta musique me rappelle le vol des gendarmes de Tromiliau.
En grimpant au château Pandore disait :
Attention au Vieux, il connaît un tas de tours de magie.
Un jour que je faisais les nids près des tours
Il m'a vu et aussitôt changé en merle.
Il n'a pas plutôt fini de parler que s'enroulent les flammes étranges
Autour des bedaines comme des démons farceurs.
Des ailes de feu décorèrent les fesses des gendarmes
"J'ai le cul gelé" criaient-ils en s'élevant doucement en l'air.

Tri Yann
Un soir à Tréhoët
Gwerz à propos de la soirée du 14 Février 1988 et des évènements survenus dans la nuit près du château.

Bientôt la nuit va tomber sur le village et sur la grève
Sur le port et l'arsenal, enfin sur la mer.
Rentre le dernier bateau, il pleut, le dernier bateau rentre,
On décharge les casiers, la mer va descendre.
Sur le chantier, l'ingénieur et le contremaître
Ont arrêté les engins, sont repartis en colère.
A la ferme de Maunoir, il reste encore les vaches à traire,
Et le vieux camion frigo rentre chez Manec'h

On rentre au café du port, on se raconte autour d'un verre
Les gendarmes tout trempés regagnent la terre,
Maudissant le vieux là-haut : Maudit soit l'Ancêtre !
Malédiction noire sur lui et ses sortilèges !
L'Etranger est dans son coin, Anjela pour le Vieux s'inquiète,
Ils s'évadent tous les deux dans la nuit secrète.

Comme la feuille en papier de blanc la lande est toute inondée
Anjela en Korrigane semble enchantée :
Je suis fille cependant, sans parents ni maître,
Et les larmes de ses yeux venaient mouiller les paupières.
Je suis fille cependant et le Vieux m'a tenu de père,
Il est gardien du château et de ses secrets.

Le vieux dit à l'Etranger Qui que tu soit quoi qu'il advienne
Tu n'es pas comme les autres, d'où que tu viennes.
Sache donc que ce château fut vaisseau de Pierre,
Et quittera ce Pays, comme il y mena nos pères,
Si nous devons repartir, en attendant, comme naguère,
Qu'ils renaissent les Anciens, du fond de l'Hiver…

Tri Yann
Klemnou ha meleudi
Plaintes des trépassés et louanges à Teutatès, Bélénos et Bacchus qui valent bien les autres dieux.

Quando caelum cadendum est
Quando terra movenda est
Quando mare bullendum est ...
Libera nos Teutatès de morte perpertua !

Libera nos Teutatès !

Libera nos Teutatès de morte perpertua
Dum veneris judicare barbarum per ignem

Laudate nomen Teutatès !
Alleluia Alleluia Alleluia Alleluia
Laudate nomen Teutatès !
Dirigatur supplicatio !
Laudate nomen Bélénos !
Dirigatur supplicatio !
Alleluia Alleluia Alleluia Alleluia
Laudate nomen Dionysos !
Tollatur poculum meum !
Quand le ciel tombera
Quand la terre sera ébranlée
Quand la mer se mettra à bouillir …
Libère-nous Teutatès de la mort éternelle !

Libère-nous Teutatès !

Libère-nous Teutatès de la mort éternelle
Quand tu viendras juger Pégrouillot par le feu

Louez le nom de Teutatès !
Alleluia Alleluia Alleluia Alleluia
Louez le nom de Teutatès !
Que la prière s'élève !
Louez le nom de Bélénos !
Que la prière s'élève !
Alleluia Alleluia Alleluia Alleluia
Louez le nom de Bacchus !
Que mon verre se lève !

Tri Yann
Cantic war sujet an anaon
Traditionnel/Tri Yann
Entendu des trépassés de Tréhoët au cours de leur pardon étrange dans la nuit du 14 au 15 Février 1988.


An Tad ar Mab ar Spered Glan
Yerc'hed mab d'hoch tud ar vro-man
Yerc'hed mab d'hoch war boez hor pen
Ni zo en tan en anken

Eul linser wenn ha pemp planken
Eun dorchen blouz dindan ho pen
Pemp troated douar war c'horre
Setu madon ar bed er bez

Ma map ma merc'h c'hwi zo kousket
War ar plun dous ha blod meurbed
Ha me ho tad ha me ho mamm
Er purkator e-kreiz ar flamm

Breuder kerent ha mignoned
Hor silaouet en han Doue
An tad ar Mab ar Spered Glan
Au nom du Père du Fils et du Saint-Esprit
Bonne santé à vous, gens de ce pays
Nous vous souhaitons une bonne santé
Nous sommes dans le feu de l'angoisse

Un drap blanc et cinq planches
Un bourrelet de paille sous la tête
Cinq pieds de terre par dessus
Voilà les seuls biens de ce monde qu'on emporte au tombeau

Mon fils, ma fille, vous êtes couchés
Sur des lits de plume bien doux
Et moi votre père, et moi votre mère
Dans les flammes du purgatoire

Frères, parents et amis
Ecoutez-nous au Nom de Dieu
Au nom du Père du Fils et du Saint-Esprit

Tri Yann
Chant des anciens
Chant des anciens tel qu'enseigné par eux-mêmes à Anjela Kervel et à un étranger, seuls témoins avec la nuit des évènements féeriques qui se sont déroulés au château de Tréhoët le 15 Février 1988 durant la troisième heure.

Noires misères de la Terre
Noires pierres par les Pères plantées
Feu noir, Tonnerre, colère des damnés
Feu noir, vipère, noire guerre, sanglier !
Rouge l'alarme sur la Terre
Rouges larmes par les armes ici versées
Fer rouge qu'acclament les âmes des damnés
Fer rouge, vacarme, sang giclé !
Noirs éclairs sur la Terre
Noirs hivers, noires chimères du passé
Feu noir, Tonnerre, colère des damnés
Feu noir, vipère, noire guerre, sanglier !
Bleu le réveil de la Terre
Bleu pareil à l'éveil ici rêvé
Ciel bleu, merveille, s'éveillent les damnés
Ciel bleu, soleil, sang nacré !

Tri Yann
Le plus dur métier
Leçon sur les vrais travailleurs de ce pays : journaliers, ardoisiers, carriers, goémoniers, ouvriers, paysans qui sont plus à plaindre que tous les autres.

Le plus dur métier qui fut sur la terre, délandélinda
Fut celui de journalier, landilé,
Que morde le vent, ou que la pluie tombe en grêle,
Tout son corps brisé, jamais le temps de chanter.
Mais le temps trop souvent
Pour la noblesse d'aller faire la guerre,
Contre elle cependant, ils éclataient de colère.
Pourtant la plus dure journée que vécut cette terre,
Délandélinda, ce fut celle de l'ardoisier, du carrier,
Tôt matin levé dans le froid et la poussière,
Tard la nuit couché, après un maigre souper.
C'est vrai pourtant, c'est vrai que la République a tué leur misère,
Mais pour elle souvent, ils devaient aussi faire la guerre.
Oui mais le plus de pitié que l'on connut sur ma terre,
Délandélinda, c'est la vie du goémonier,
Dans la fumée jaune et salée, à déhaler sur la grève,
Brûlé par l'été, à racler sur les rochers.
C'est vrai pourtant, c'est vrai
Que les rouges ici en ont sorti mon père,
Mais il a du partir dans une usine de Quimper comme potier.
Et le plus dur métier qui nous reste en cette terre,
Délandélinda, c'est celui de l'ouvrier, ce damné,
Les plus durs moments que nous garde notre terre,
Délandélinda, ils sont pour toi, paysan.
Car ici maintenant, on te prend ta ferme et on te vole ta terre,
Et on te prend tes champs. Malheur à toi, paysan !

Tri Yann
Les préparatifs du déménagement
Les préparatifs du déménagement par les gens de Tréhoët, jeunes et vieux.

On a dégondé le mobilier, vidé le grenier
Et vite lavé les vitres délavées.
Et on a viré le vaisselier, dévissé l'évier,
On a vidé les valises et avisé.

Au château, tout là-haut, les mobilos protégeaient le boulot.
Au bateau Pégrouillot l'apprend par la radio.
On a démonté le sommier, ciré les souliers,
Monté le palmier, remonté les paniers
On a décapé les clapiers et le canapé,
On a dégagé les cages et la télé.
Embarque, Jacques, ta vache, ton sac, plaque ton boxon.
Charge ta jeep, Jess...
En vrac, Max, arrache ton saxe, claque ton paxon.
Jette ton joug, Jess...
On a visité les viviers, vidé les casiers,
On a ramassé les nasses, on s'est cassé.
Marec, prête ton break, Eh mec, jette ton varech,
Sèche ton business...
On a décroché Saint-Avé et le bénitier,
On a descendu le Jésus du jubé.
On a déblayé le pailler, balayé, taillé.
On a dit vaille que vaille on va y aller.

Tri Yann
Kimiad eur paour kaez den oblijet da guitad e vro
Gilles Servat/Tri Yann
Chanson sur l'adieu d'un pauvre fi'd'garce obligé de quitter son pays.

Kemer a ran un dornadig douar
A-raok partial war vor hep distro
En tu all d'ar mor ra gavin douar
Ken flour em daouarn ha douar ma bro
Selaou a ran kan laouen an evned
A-raok partial war vor hep distro
En tu all d'ar mor ra gavin evned
A gan ken lirzhin hag evned ma bro
Sellout a ran ouzh raden ar roziou
A-raok partial war vor hep distro
En tu all d'ar mor ra gavin roziou
Ken glas ken tener ha roziou ma bro
Debrin a ran ur meudad gwinizh-du
A-raok partial war vor hep distro
En tu all d'ar mor ra gavin ed-du
C'Hwez vad warnañ'vel gwinizh-du ma bro
Je prends une petite poignée de terre
Avant de partir sur la mer sans retour
De l'autre coté de la mer puissé-je trouver de la terre
Aussi douce dans les deux mains que la terre de mon pays
J'écoute le chant joyeux des oiseaux avant de partir...
Avant de partir sur la mer sans retour
De l'autre côté de la mer puissé-je trouver des oiseaux
Qui chantent aussi joyeux que les oiseaux de mon pays
Je regarde la fougère des collines avant de partir...
Avant de partir sur la mer sans retour
De l'autre côté de la mer puissé-je trouver des collines
Aussi vertes aussi tendres que les collines de mon pays
Je mange une pincée de blé noir avant de partir...
Avant de partir sur la mer sans retour
De l'autre coté de la mer puissé-je trouver du sarrazin
Plein de bonne odeur comme le blé noir de mon pays

Tri Yann
Les guerriers d'une nuit
Tri Yann (Vocal : G. Goron)
Rock sur un casse à l'arsenal début 88.


Quand l'horizon s'est éteint sous les brumes du couchant,
Les guerriers d'une nuit avancent sans bruit
Comme l'éclair d'une lance au pays des géants
Ils s'abattent, foudroyant les gardiens de la nuit :
Des cœurs qui s'affolent,
Des pas qui résonnent.

Telle une horde sortie des entrailles de la Terre
Ils se jettent à l'assaut de la muraille d'acier.
Des ponts à la passerelle tout apparaît désert,
Le temps s'est arrêté dans l'entrelacs d'acier :

L'angoisse qui bourdonne,
Des corps qui frissonnent.

Magie de l'eau,
Ouvre tes voies secrètes qui scintillent
Au ras des flots
Vers des terres nouvelles, invisibles.

Le parfum de la marée enivre les esprits,
Le vent fouette les visages que le froid engourdit.
Sur l'océan le cargo glisse tout doucement,
Dans les brumes irisées d'une mer enchantée :
Des hommes qui s'étonnent,
Des voix qui fredonnent.

Tri Yann
Histoire du bateau blanc changé en goéland
Gwerz au sujet du songe de Michel Aoustin à bord du "Tricolore", navire de la Royale détourné vers Tréhoët par des ouvriers de l'arsenal dans la nuit du 15 au 16 Février 1988.

Un bateau blanc sort de la ville
Je le vois en rêve en goéland se transformer
Ses ailes sont brisées, ses yeux sont arrachés,
Son sang dans la mer a coulé.

Feu et flamme, bouillonnante marée,
Du ventre d'acier a giclé le sang rouillé.
La vague cingle la terre où je suis né,
Feu et flamme dans mon cœur déchiré.

Flamme et feu, des bouquets de laminaires
Gomme les cheveux de Cuchulainn ont flamboyé.
Des vagues de mercure fracassent les rochers
Et la terre, la mer, le ciel se sont mêlés.

Pourtant je dis que ce pays était beau,
Beau comme un éclat de matin dans la rosée :
Douceur du sable, caresse des marées,
Senteur des landes aux soirs d'été.

Un goéland détend ses ailes
Entre le ciel et terre, silencieux, fatigué.
Un bateau sort de l'ombre
Comme un oiseau géant,
Comme un grand oiseau blanc
D'acier.

Tri Yann
Kan bale ar re varo
Gilles Servat/Tri Yann
Marche des morts sur les évènements sensationnels et déterminants qui se sont déroulés à Tréhoët dans la nuit du 15 au 16 Février 1988.


Ar plac'hig a lavare d'he mamm gozh ha d'ar c'hure
Me a well ar re varo
Un arme sioul a welan goloet ganti al lann ar re varo
Eus doriou Kozh ar c'hastell dihunet dre strobinell
E tiskenn rummou kouerien ha rummou brezelourien
Marvet dec'h marvet pell zo ar re varo

Kalon am lagad, emgann, gwad, argad
Penn am brec'h, Penn Moc'h, Penn, Penn
Tud d'an emgann, gwad, gwad
Kalon am lagad, emgann, gwad, argad
Penn am brec'h, Penn Moc'h, Penn, Penn
Penn moc'h ha penn, Penn moc'h, argad, gwad

Tud a heulie d'an emgann
Nevenoe mestr ar gadlann
Trec'het ganto ar roue moal

Deomp, deomp, deomp, deomp, deomp, deomp, d'ar gad
Deomp, kar, deomp, breur, deomp, map, deomp, tad !
Deomp ! deomp ! deomp holl ! Deomp'ta, tud vad !

Breizhiz kenta war an aodou
Ha Kelted koz war o roudou
Tokou brezel war o fennou

Tud a veve a-raok an dir
Hag an erevent glas a vir
War pleg o fenn bep a vaen-hir

Kalon am lagad, emgann, gwad, argad
Penn am brec'h, Penn Moc'h, Penn, Penn
Tud d'an emgann, gwad, gwad
Kalon am lagad, emgann, gwad, argad
Penn am brec'h, Penn Moc'h, Penn, Penn
Penn moc'h ha penn, Penn moc'h, argad, gwad
Gwasket an Dud

La fillette disait à sa grand-mère et au curé
Je vois une armée silencieuse qui couvre la lande, les morts
Des vieilles portes du Château réveillées par enchantement
Descendent des générations de paysans et de guerriers
Morts hier morts il y a longtemps, les morts

Cœur pour œil, Combat, sang, bataille
Tête pour bras, Sanglier, Peuple au combat,
Sanglier et tête, Sanglier, Bataille, Sang !

Les gens qui suivaient au combat Névénoë
Maître du champ de bataille. Vaincu par eux le roi chauve.

Allons au combat, parent, frère, fils, allons père,
Allons tous, allons donc, hommes de cœur.

Premiers Bretons sur les côtes et vieux Celtes
Sur leurs traces, coiffés de casques de guerre.

Gens qui vivaient avant l'acier et monstres verts
Qui gardent sur le pli de leur tête chacun un menhir.

Cœur pour œil, Combat, sang, bataille...
…Le peuple est opprimé.

Tri Yann
Gwerz inimaginabl war disparti lestr a vaen
Gilles Servat/Tri Yann
Récit impitoyable sur le départ des gens de Tréhoët le 16 Février à sept heures du matin.
Un évènement merveilleux dont la vérité authentifiée par un rapport de la gendarmerie de Tromiliau restera gravée dans la tête des jeunes gens de la Basse-Bretagne et du pays Gallo.


Kouc'h meur a vaen ! Digor ar mor, staon-maen
Digor ar stlañ gant da staoñ ! Digor ! Digor !

Digor ar mor ! Digor dor an digoun
War c'horre goullo ar c'houmm digor ar spoum !

Kastell e staoñ-maen kastell o sturiañ ac'hanomp.
Kastell a strink ar stlañ a bep tu d'e stumm

Pellaat a res ar spont ar spont Kastell meur
Touriou o kas ar spi ar spi touriou o kas ar spi
Kouc'h meur maen lom ac'hanomp etreze ar c'hornog
En dour gwen da roudenn war c'horre ar mor glas
Kastell ! Lom ac'hanomp etreze ar c'hornog
Dindan ar skrin skornet lec'h ma sklint ar stered
Kastell pellaat a res ar spont ar spont kastell meur
Touriou o kas ar spi ar spi touriou o kas ar spi
Grande coque de pierre ! Ouvre la mer, étrave de pierre !
Ouvre la mousse avec ton étrave Ouvre ! Ouvre !

Ouvre la mer ! Ouvre la porte de l'oubli !
Sur la surface vide de la vague ouvre l'écume

Château a l'étrave de pierre Château qui nous guide
Château que l'écume éclabousse de chaque coté de sa forme

Tu éloignes la peur la peur grand Château
Tours portant l'espoir l'espoir
Grande coque de pierre pilote-nous vers l'ouest
Dans l'eau blanche de ton sillage sur la surface de la mer bleue
Château ! Pilote-nous vers l'ouest
Sous l'écrin glacé où tintent les étoiles
Château ! Tu éloignes la peur
Tours portant l'espoir, portant l'espoir !

Tri Yann
Les lambeaux de l'enfance
Souvenirs d'un exilé

Y'a des lambeaux de l'enfance
Dans mon exil pour couvrir ses Toussaints,
Y'a la résine des pins
Qui poisse encore dans mon cœur éteint,
Le goût du lait de Mendès
Et les problèmes de robinet.
On se prenait pour Bobet,
Sur nos vieux clous, dans les champs de genêts.
La poudre rafraîchissante
Nous faisait boire commme en plein Juillet.
Tintin marchait sur la lune
Et nos grands frères dans les dunes des Djebels.

Avec mon père en septembre on partait le matin
Sur sa mobylette orange pour pêcher des oursins

Y'a des fleurs d'adolescence
Dans mon exil pour border ses matins,
Y'a des parfums de raisin
Dans mes valises bouclées pour demain.
C'était l'année de Mao :
le F.L.B. faisait tout sauter,
On découvrait Tabarly,
Stivell ramait chez Ty-Jos à Paris,
On était fans de Sylvie, de Budzinski et de Jazy.
Armstrong marchait sur la lune
Dans nos amours on laissait des plumes.

Y'a dans les rêves de l'enfance
Les ouragans de demain.

Tri Yann
L'en dro vert
L'en dro vert déstiné au colportage, n'ayant pas encore reçu l'autorisation légale du préfet du Morbihan, commisaire de la République qui l'a qualifié de charabia séditieux.

Les aimants s'aiment dans les champs,
Et les savants s'en vont suivant,
Et revoilà le gai printemps...

Dans les champs d'acétamone et dans les prés tout gris,
Les sentiers de méthormone et dans les bois jaunis,
Dans les matins de séritone, de lindane, de prodaminol,
Dans les jardins de propylène, de polyéthylène,
De paradichlorobenzène, d'isobutène, de toxaphène,
De polyoxyméthylène, de dichloropropylène,
De butène et de phénylène, de kérosène, de pentaphène,
De chlorodinitrobenzène, d'hexahydrotoluène,
D'endométhanonaphtalène, d'aminodiméthylbenzène,
De chlorométhapyrilène, de propène et de naphtalène,
De polyoxypropylène, de bichloronitrobenzène.

Dans les champs de sanizole et dans les prés tout gris,
Les sentiers de butazol et dans les bois jaunis,
Les matins de simazine, de pyrroline,
De méthylaziridine, dans les prés tout gris,
Les parfums de bonzoile et d'acétyle,
Et de méthylsulfunyle, dans les bois jaunis.
Les matins de tolidine, de carboline,
De monométhylanine, dans les prés tout gris,
Les parfums de méthoxyle et de formyle,
De phényle et de propyle, dans les bois jaunis,
Les matins d'obidoxime et d'hydrazine,
De dimethylaniline, dans les prés tout gris,